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« Me voici donc seul sur la terre, n’ayant plus de frère, de prochain, d’ami, de société que moi-même », écrivait Jean-Jacques Rousseau dès les premières pages de ses Rêveries du promeneur solitaire. Tout en poursuivant : « Bientôt de la surface de la terre j’élevais mes idées à tous les êtres de la nature, au système universel des choses, à l’être incompréhensible qui embrasse tout. Alors, l’esprit perdu dans cette immensité, je ne pensais pas, je ne raisonnais pas, je ne philosophais pas, je me sentais avec une sorte de volupté accablé du poids de cet univers, je me livrais avec ravissement à la confusion de ces grandes idées, j’aimais à me perdre en imagination dans l’espace; mon cœur resserré dans les bornes des êtres s’y trouvait trop à l’étroit, j’étouffais dans l’univers, j’aurais voulu m’élancer dans l’infini ».
On attribue à Diderot cette définition de la rêverie : « On appelle rêverie toute idée vague, toute conjecture bizarre qui n’a pas un fondement suffisant, toute idée qui nous vient de jour & en veillant, comme nous imaginons que les rêves nous viennent pendant le sommeil, en laissant aller notre entendement comme il lui plaît, sans prendre la peine de le conduire […] ». Je me satisfais pleinement de cette définition surtout lorsque le corps s’alanguit et que l’esprit consomme ses dernières sources d’énergie.
Dans sa cinquième promenade, Rousseau écrit : « Tout est dans un flux continuel sur la terre : rien n’y garde une forme constante et arrêtée, et nos affections qui s’attachent aux choses extérieures passent et changent nécessairement comme elles. Toujours en avant ou en arrière de nous, elles rappellent le passé qui n’est plus ou préviennent l’avenir qui souvent ne doit point être : il n’y a rien là de solide à quoi le cœur se puisse attacher. […] À peine est-il dans nos plus vives jouissances un instant où le cœur puisse véritablement nous dire : Je voudrais que cet instant durât toujours […] ».